Une norme AFNOR pour les sophrologues : la naissance d’une souris

le 31 mars 2023

Le métier de sophrologue est un métier non règlementé, sans texte ni ordre, sans organisme central de régulation. La formation au métier n’est pas règlementée non plus : chaque organisme peut former au métier de sophrologue comme il le souhaite, d’un week-end à 400 heures.

Comme aucune règlementation encadre l’exercice professionnel, l’offre des sophrologues est très variée du thérapeute (sic) autoproclamé à l’intervenant qualifié et expérimenté, respectueux des fondamentaux de la sophrologie.

Pour essayer de mettre un peu de cadre à ce merveilleux métier, les différents acteurs se sont réunis pour rédiger une norme pour codifier l’exercice professionnel. Les professionnels ont donc fait appel à l’ANFOR pour être aidé dans l’élaboration de cette norme. L’AFNOR est un organisme privé qui accompagne les professionnels pour élaborer des normes volontaires. Ces normes ne sont en aucun cas des textes réglementaires ou législatifs. Ce sont des conventions entre des partenaires qui attestent d’un certain nombre de critères librement définis.

la naissance d'une souris

26 acteurs de la sophrologie se sont donc réunis régulièrement pendant près de 2 ans en commission de normalisation pour élaborer une norme. Tous les intervenants significatifs de la sophrologie et ses différents courants étaient représentés : Sofrocay (Caycedo), SSP (Syndicat des Sophrologues Professionnels), FEPS (Fédération des Ecoles Professionnelles de Sophrologie) , SSI (Syndicat des Sophrologues Indépendants), FFESC (Fédération Française des Écoles de Sophrologie Caycedienne) , CS (Chambre Syndicale de la sophrologie), SFS (Société Française de Sophrologie) et l’IFSMS (notre institut de formation professionnelle).

Et c’est là que les difficultés ont commencé…

L’objectif de la commission et de la norme était de définir un cadre de l’exercice professionnel qui apporte aux utilisateurs de la sophrologie, aux clients, un niveau de qualité satisfaisant et une garantie de bon exercice professionnel. Cette norme était censée permettre de distinguer les pseudo sophrologues, les charlatans, des professionnels bien formés qui exercent dans un cadre sécure et qualitatif. Cette norme devait aussi poser le cadre de la formation au métier de sophrologue afin que celle-ci apporte au futur praticien les bases et les fondamentaux pour un exercice professionnel qualitatif.

Les participants de la commission sont, depuis des années, dans une relation concurrentielle quotidienne, pour imposer leur conception de la sophrologie, de la formation et du métier. Les écoles au métier représentées proposent des parcours de formation très différents tant dans leurs contenus, que dans leurs finalités que dans leur durée. Les débats ont donné lieu à des tentatives de compromis tous inaboutis ; chacun voulant conserver ses prérogatives et ne rien abandonner de ses particularités.

Comme la participation à cette commission avait un coût non négligeable pour chaque participant, ils ont finalement réussi à s’entendre sur un texte neutre, sans engagement qui n’obligeait aucun des participants à modifier sa posture et son activité ; un texte sans intérêt qui ne dérangeait personne et qui n’apportait rien de nouveau ; tout existait avant la commission.

C’est ainsi que le montage a accouché d’une souris.

[(Allusion littéraire) Disproportion entre un projet annoncé comme très important et l’inconsistance ou le ridicule du résultat final. Source : fr.wikitionnaire.org]

La norme porte la référence NF S 99-805 « Sophrologie – Qualité de service du sophrologue ».

La norme reprend des généralités que tout sophrologue devrait déjà appliquer. Tout ce qui est dans la norme comme « exigences » professionnelles fait partie du parcours formatif de notre institut… et nos programmes vont bien au-delà de ces prescriptions.

La formation du sophrologue est mentionnée mais sans aucune indication du volume horaire nécessaire, du contenu type ou des modalités d’évaluation de fin de parcours. Donc tout organisme, quel que soit son programme, respecte les indications de la norme tellement elle est imprécise et incomplète.

Même l’exigence de la certification Qualiopi pour les organismes de formation est relativisée (alors que c’est une exigence de la loi pour l’obtention de financement public par les stagiaires) : « Il convient, de préférence, que les moyens mis en œuvre […] aient été validés par un organisme accrédité… » C’est le « de préférence » qui rend la certification Qualiopi facultative !! En fin de compte cette norme n’apporte pas d’information pour la personne en recherche d’une formation ou d’un sophrologue !

Cette norme est une norme volontaire sans certification. C’est-à-dire que le sophrologue professionnel applique - ou pas - la norme, selon son souhait et est auto-déclarant. L’application de la norme par le sophrologue n’est pas vérifiée, ni attestée, par un organisme indépendant extérieur. Contrairement aux normes contraignantes comme, par exemple, la norme Qualiopi où un auditeur indépendant accrédité par la CNEFOP vient vérifier sur site que les critères normatifs sont bien remplis par l’organisme. Ce n'est qu’après cette vérification que l’organisme est certifié. Mais rien de cela pour la norme AFNOR Sophrologue.

Devant ce vide, la Chambre syndicale de la sophrologie essaye de s’arroger le rôle de certificateur en ayant déposé auprès de l’INPI deux noms aux sonorités de label. Cet organisme ne peut être organisme certificateur car, d’une part, il n’est pas représentatif de la profession et n’a pas de légitimité et, d’autre part, se heurte à un mélange des genres et un conflit d’intérêt puisque les directions de la Chambre syndicale et de l’IFS, organisme de formation privé, sont les mêmes. A ce jour, il ne semble pas qu'une autre organisation se soit manifestée pour se positionner comme certificateur potentiel.

En partant d’une intention louable avec la volonté de donner au métier de sophrologue une dimension professionnelle et une reconnaissance, la commission de normalisation n’a produit qu’une norme vague, qui n’ajoute rien à l’existant et dont l’application est sujette à imprécision et dérive commerciale.

Malgré tout, au sein de l’IFSMS, nous avons ajouté la formation à la norme AFNOR pour les futurs sophrologues car elle existe et est inscrite dans leur environnement professionnel. Il est donc indispensable que les apprenants en connaissent et mesurent les termes.

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